Cours de Jeu de Carte #4 : L’ante : une mise forcée

L’ante, c’est la mise que doivent payer tout les joueurs avant le début d’un coup. Il est essentiel à l’intérêt du jeu. Sans cette mise de départ, seuls les joueurs qui possèdent une main forte joueraient les coups. De ce fait, les autres joueurs ne prendraient jamais le risque de suivre avec une petite main, sachant que seuls ceux qui ont une main à forte valeur miseraient. L’ante permet le remplissage du pot, attisant ainsi l’intérêt des joueurs pour ce dernier. C’est pourquoi il est essentiel au bon déroulement d’un coup pour lequel les joueurs sont combattifs et intéressés.

A l’extrême, un ante exagérément cher ferait du Poker un simple jeu de hasard. Une partie dans laquelle l’ante ne serait pas limité n’aurait pas non plus d’intérêt. Imaginez-vous dans un coup dont la mise de départ va de 5 a 10 euros. Si un des joueurs pouvait monter sont ante à 100 euros, votre cote de pot passerait à 21 contre 1. Tout joueurs, quelque soit sa main, tenterait le coup. Il n’y aurait plus de technique ou de stratégie, le joueur ne s’en remettrait qu’au bon vouloir du hasard des cartes qui peuvent encore sortir.

Qu’un ante nul ou exagérément cher annihile l’intérêt de la partie permet de montrer la nécessité de l’ante lui-même. Il constitue en effet un facteur important pour décider du mode de jeu à adopter. La taille de l’ante est essentiel à connaître pour le considérer. Il est courant d’admettre qu’un ante dit « bas » correspond à maximum 5% des mises à venir, tandis qu’un gros ante équivaut à minimum 15% des prochaines mises. Entre ces deux taux, ont dit de l’ante qu’il est moyen. Rappelez vous que le montant réel de l’ante importe peu pour en déterminer la taille : par exemple, 50 centimes d’euros est un ante moyen pour un coup à 5-10euros ; de même, 100 euros est un ante moyen pour une partie à 1000-2000euros. Ce qui importe réellement pour estimer la taille de l’ante est le pourcentage des mises à venir.

En règle générale, on admet que : plus l’ante est bas par rapport aux prochaines mises, moins vous devez jouer de mains ; et inversement, plus il est élevé par rapport aux mises à venir, plus vous devez jouer de mains. Dans le langage usuel des habitués du Poker, il est courant d’entendre : à ante faible, jeu serré ; à ante haut, jeu large.

Pour mieux comprendre la structure d’antes et adapter les conseils à votre jeu il est nécessaire d’apporter quelques précisions. Dans ces leçons, quand on parle de l’ante, on y inclut les blinds et les mises forcées, aussi appelées « bring-in », pour permettre au joueur d’élargir la leçon à tout type de parties possibles. Par exemple, en Hold’em, où l’ante comprend le ou les blinds de départ, ou encore au Stud à 7 cartes, où c’est le joueur qui possède la plus petite carte au premier tour qui devra payer la mise forcée, qui constitue le dit ante pour ce type de partie.

Mal considérer la taille et, par exemple, jouer beaucoup de mains avec un ante très faible sont des erreurs fréquentes qui peuvent mettre le joueur en difficulté tout au long de la partie. La meilleure façon de penser l’ante est de le penser à travers les cotes et l’espérance mathématique. Souvent, les joueurs suivent, alors que s’ils pensaient en termes de cote et d’espérance mathématique, ils s’en abstiendraient. Une erreur commise la plupart du temps parce que l’on pense en fonction des mises déjà effectuées. Il faut, et cela va déterminer vos actes et votre mode de jeu, considérer le pot comme un tout, et non y déceler le montant misé de votre propre cagnotte. L’erreur en question est le plus souvent commise par le dealer (ou donneur), qui paye les antes pour tout le monde et a tendance à jouer large pour récupérer sa mise, à tort. En réalité, peu importe la provenance de l’argent du pot, qu’il vienne de votre poche ou de celle de quelqu’un d’autre ne doit pas influencer votre facon de jouer.
Il y a cependant des exceptions à cette règle, notamment en Hold’em, où lorsque vous êtes en position de big bling (ou grosse blinde), il est préférable pour vous de jouer large. Je m’explique. Vous payez une blind de 5euros. Un joueur relance à 10, tout les autres doivent donc suivre à 10. Arrive votre tour, ayant déjà misé vos 5euros de blind, vous ne devez suivre que de 5. Supposons que le pot s’élève à 35euros. La cote du pot des autres joueurs est donc de 3,5 contre 1, tandis que la votre est de 7 contre 1, le double. Quelque soit votre main, vous avez tout intérêt à suivre. Dans ce genre de situation, avoir payer l’ante engage donc à jouer large.

Les gros antes

Nous avons vu précedemment que généralement, on admet au Poker que plus l’ante est élevé par rapport aux mises à venir, plus l’on doit jouer large (c’est à dire jouer beaucoup de mains). Première raison à cela : plus l’ante est cher, plus il y a d’argent dans le pot; et donc meilleur est le rapport. Seconde raison qui explique que vous devriez jouer large avec un ante élevé : si vous laissez passer beaucoup de mains (dans une partie où les antes sont élevés nous le rappelons) en attendant d’en avoir une vraiment bonne pour la jouer, vous risquez d’avoir perdu plus cher en antes que ce que vous ne pourrez gagner en remportant un pot. Surtout que ce même pot risque d’être de petite taille, du fait qu’en jouant serré, vous poussez vos adversaires à se coucher lors du peu de coups dans lesquels vous rentrez. De plus, le peu d’adversaire qui vous suivront auront surement une main de forte valeur qui risque de battre la votre. Jouer serré dans une partie à gros antes n’est donc pas la meilleure des positions à adopter.

Il est courant lors de parties à gros antes des mains jouées alors que dans une partie à petit ante ces mêmes mains auraient été jetées dans l’instant. En effet, plus l’ante est elevé, plus les autres joueurs jouent de mains, et ce en se souciant de moins en moins de leur valeur de départ. Il est nécessaire pour votre « survie » dans la partie d’être, à votre tour, de moins en moins regardant quant à la valeur de vos mains, et ce progressivement au fur et à mesure de tours et de l’augmentation des antes. Le fait de miser sur des mains marginales est d’autant plus observable lors des confrontations à 2 joueurs, dans lesquelles il n’est pas rare de voir les deux adversaires se suivrent jusqu’au bout pour une simple paire. Voila qui donne une raison supplémentaire de ne pas jouer serré dans une partie à gros antes, faute de quoi vos adversaires tenteront forcémment de récupérer les antes, même avec une main des plus marginales, lors du peu de coups pour lesquels vous vous lancerez.

De plus, il est important de préciser que dans une partie à antes élevés, sous jouer une main de forte valeur (c’est à dire l’ouvrir avec une faible mise pour que l’adversaire vous suive, cf. leçon 15) n’est pas intéressant pour votre jeu. En effet, cela donne l’occasion à l’adversaire de voir la carte suivante quasi-gratuitement, lui permettant ainsi d’obtenir, grâce aux antes chers, un bon rapport de gains. Le laisser voir cette carte c’est aussi lui donner une chance qu’elle soit la carte idéale pour parfaire sa main de départ. A l’inverse, en relançant, vous brisez sa cote et il ne peut que jeter sa main sans valeur. Avec des antes chers et une bonne main, il est inutile et risqué de tenter de récupérer les mises de votre adversaires. Mieux vaut donc se contenter de récupérer les antes sans prendre le risque que la main adverse ne s’améliore avec le tirage.

Il serait bon de résumer ces conseils en quelques points. Lors d’une partie à gros antes, vous devez :
Etre moins regardant quant à vos mains de départ. D’abord, attendre d’avoir une très bonne main vous coutera cher en antes, tandis que jouer même des mains de valeur moyenne améliore votre cote du pot. De plus, jouer serré pousse l’adversaire à se coucher quand vous entrez dans un coup, craignant une main meilleure que la sienne. Jouer large vous est donc profitable (attention cependant aux pots multi-joueurs qui peuvent donner aux adversaires l’occasion d’améliorer leurs mains pendant l’abbatage).

Tenter de voler les antes, surtout si vos adversaires jouent serré, car alors votre espérance mathématique est des plus positives.
Relancer avec une bonne main et ne pas la sous jouer. Sinon, vous faites profiter votre adversaire d’une cote de pot avantageuse. Si leur cote n’est pas avantageuse, l’ante élevé les pousse à suivre votre mise, et c’est exactement ce que vous voulez obtenir de lui (cf. le théorème fondamental du Poker).

Les parties à antes peu élevés

Jouer serré dans les parties à gros antes est préjudiciable au joueur, certes, mais il est beaucoup plus courant d’observer des joueurs comettre l’erreur inverse : jouer trop large dans des parties à petit ante ou ante moyen. La conséquence directe d’une telle manoeuvre est que vos mains seront en moyenne de plus faible valeur que celles des autres joueurs, en supposant que ces derniers ajustent correctement leur jeu en fonction de l’ante. La logique est évidente : la gamme de mains de départ des joueurs adversires serait plus réduite que la vôtre. C’est pourquoi votre main moyenne serait de moins bonne valeur que la leur. Autrement dit, avec un tel jeu, mieux vaut se conditionner mentalement à être le grand perdant de la soirée! Et ce même si vous êtes le plus expérimenté et le plus habile des joueurs de la table. A partir du moment où vous ne prenez pas en compte le facteur essentiel qu’est la taille des antes pour ajuster votre jeu, vous serez perdant à coup sûr.

Jouer avec de petits antes consiste tout simplement à faire l’inverse de ce qu’il faut faire lors d’un coup à gros ante (cf. précedemment) :

– jouer serré (c’est à dire être plus regardant quant à la valeur de vos mains de départ)
– ne pas essayer de voler les antes (laissez cela à vos adversaires, de toute facon, quand vous entrerez dans un coup, votre main sera meilleure que ceux qui jouent large et vous récupérerez les antes qu’ils auront pu voler au cours de la partie), – et sous jouez vos mains de forte valeur (pour inciter les adversaires à vous suivre et ainsi augmenter vos gains).

Si l’envie vous prend de vouloire tout de même « voler les antes », avec une main de faible valeur, prenez garde aux adversaires qui jouent serré comme vous. S’ils vous suivent ou qu’ils renchérissent, mieux vaut ne pas prendre de risque : couchez vous, s’ils sont entrés dans le coup, leur main est surement meilleure que la vôtre.

Même s’il est conseillé de jouer serré dans une partie à petit ante, ne partez pas dans les extrèmes : ne laissez pas non plus passer trop de mains, vous en seriez pénalisé. En Hold’em par exemple, les parties à petit ante ont aussi une ouverture de départ peu élevée. Dans ce cas, il vous faut tenter votre chance, même avec une main dite « marginale ». Suivre sur l’ouverture, tenter d’améliorer votre main avec le flop et abandonner s’il n’est pas en votre faveur, telle doit être votre devise.

Prenons l’exemple d’une partie à 3-6euros, dont l’ante s’élèverait à 10 centimes. Jouer serré ici n’est pas la meilleure des approches. Pour une mise de départ de 50centimes, il est intéressant de suivre et de tenter le coup, même avec une main de faible valeur. La cote implicite (cf. leçons suivantes), ici, vous incite à suivre, en espérant que le flop améliore votre main de départ (n’oubliez pas qu’au Poker, tout est possible, et les retournements de situation, très fréquents, font le piment du jeu). Si votre main ne s’est cependant pas améliorée au « turn » (c’est à dire à la 4ème carte sortie), ayez la sagesse d’abandonner le coup. La chance tournera surement et vous récupérerez la mise perdue aux tours suivants, avec une main qui mérite que vous suiviez le coup jusqu’au bout.

Pour conclure, la taille de l’ante est déterminante dans le choix de vos actions : jouez large avec de gros antes, jouez serré avec de petits antes (attention, comme toute règle, celle ci comporte ses exceptions). Si vous ne respectez pas cette règle générale, il vous en coutera forcemment de l’argent.